Quatre associations de patient.e.s unies pour recueillir et valoriser l’expérience des personnes greffées sur la vie avec leurs médicaments anti-rejet
Les 2 et 3 décembre 2019, France Greffe Cœur et/ou Poumons (FGCP), Renaloo, Transhépate et Vaincre la Mucoviscidose ont co-organisé un séminaire sur le thème de l’expérience des patient.e.s au service de l’évaluation des médicaments anti-rejet.
Pourquoi une telle initiative ?
« L’union d’associations de patient.e.s concerné.e.s par la greffe autour d’un projet qui met en lumière leur qualité de vie doit nous permettre d’influencer les autorités en charge d’évaluer les médicaments anti-rejet » indique André Le Tutour, vice-président de Transhépate. Et Eric Buleux-Osmann, également vice-président de Transhépate d’ajouter que « les associations de patient.e.s ont un rôle à jouer dans les processus conduisant à la fixation des prix des médicaments ».
Cette démarche, co-construite avec le soutien du bureau d’étude CEMKA, a été l’occasion de croiser les expériences parfois douloureuses, souvent résilientes et toujours extrêmement instructives de celles et ceux qui, greffé.e.s ou proches de personnes greffées, vivent des parcours de vie complexes avec la maladie et les traitements.
Le déroulement du séminaire
Organisé sur deux journées, plus de trente personnes venant de toute la France, se sont ainsi retrouvées pour partager, donner d’elles-mêmes, y compris sur les aspects les plus intimes de leur vie, échanger mais aussi travailler en ateliers sur un vaste projet d’enquête qui sera prochainement adressé à l’ensemble des personnes greffées et leurs proches.
Notre objectif commun était résumé par Claire Macabiau, présidente de FGCP : « donner la parole à toutes celles et ceux qui, grâce à la greffe, ont gagné un supplément de vie mais qui, avec les médicaments anti-rejet, doivent composer avec de lourdes contraintes et des conséquences importantes sur leur vie sociale, professionnelle, intime et sexuelle ».
Un démarche inédite qui montre combien les patient.e.s ont besoin d’écoute et de considération.
« Cette initiative est une première » précise Anne-Sophie Duflos, adjointe à la direction médicale de Vaincre la Mucoviscidose.
Pendant plusieurs mois, nos quatre associations ont œuvré pour que ce séminaire puisse avoir lieu, pour que leurs adhérent.e.s puissent participer à ce temps fort de notre mobilisation collective.
Pendant deux jours et au cours de deux ateliers de travail, une dynamique interassociative est née avec la ferme volonté d’agir ensemble pour que l’évaluation des médicaments dont la vie des personnes greffées dépend, tienne mieux compte de leur impact sur leur qualité de vie et celle de leur entourage.
Des constats qui doivent être pris en compte
Bien que beaucoup de participant.e.s considèrent contraintes et effets non désirés comme un prix à payer pour l’accès à une nouvelle vie permise par la greffe, les effets secondaires possibles des médicaments anti-rejet restent nombreux et souvent pénibles ou invalidants, même s’ils ne surviennent heureusement pas de façon systématique ni constante.
Parce que devoir réduire sa vie sociale du fait des prises de médicaments, vivre avec une fatigue générale constante, des interdits alimentaires, avoir une libido en berne, des troubles de l’humeur, une pilosité augmentée (ou l’inverse !), des migraines, des problèmes dentaires, dermatologiques, musculaires ou encore des pertes de mémoire, se savoir menacé.e par un risque accru d’infection ou de cancer, ce n’est pas avoir une vie « normale ». Et il est fondamental que l’ensemble de ces effets soient pris en compte par les médecins qui prescrivent ces médicaments, dans la recherche, mais aussi par les autorités qui évaluent les médicaments.
D’ailleurs, la médecine fondée sur les preuves (Evidence Based Medicine) n’est-elle pas supposée intègrer les préférences des patient.e.s au même titre que l’expérience clinique du praticien et les meilleures données actuelles de la recherche clinique ? C’est en tout cas ce que réaffirme, à juste titre, Christian Saout, président du conseil pour l’engagement des usagers à la HAS.
« Ces réunions sont très enrichissantes vu la qualité des échanges et travaux » déclare Jean-Pierre Thierry, représentant des usagers à la Commission de la Transparence de la HAS. Appelant les patient.e.s « à devenir, plus que jamais, acteur/trice conscient.e de leur santé », Jean-Pierre Thierry est convaincu que notre approche, à la fois rigoureuse au plan méthodologique et utile d’un point de vue sociétal et citoyen est la bonne. La seule qui vaille pour que la recherche fasse un pas en direction de la qualité de vie des patient.e.s qui ne peuvent plus seulement remercier la science d’être en vie mais qui ont le droit d’attendre des progrès thérapeutiques au plus près de leurs attentes.
« Ensemble, nous sommes plus forts », indique Jean-Pierre Lacroix, vice-président de Renaloo « au-delà de la nécessité de mieux prendre en compte l’expérience des patient.e.s dans le processus d’évaluation des médicaments, nous souhaitons tendre vers une véritable décision médicale partagée, y compris pour le choix des thérapeutiques en transplantation. »
Les prochaines étapes
Après avoir phosphoré pendant ce séminaire, nos associations stabiliseront un questionnaire qui sera proposé à toutes les personnes greffées et à leurs proches début 2020.
Pour que cette enquête soit un succès pour la démocratie sanitaire, la reconnaissance des droits des patient.e.s et l’amélioration des conditions de vie avec des médicaments anti-rejet, « nous aurons besoins du soutien du plus grand nombre et en particulier des professionnel.le.s de santé qui travaillent quotidiennement aux côtés des patient.e.s greffé.es » souligne Christian Baudelot, vice-président de Renaloo.
Renaloo mettra sa plateforme MoiPatient.fr à disposition de l’ensemble des participant.e.s à l’enquête : « Un outil sur-mesure pour recueillir, en toute sécurité, les données que voudront bien nous confier les patient.e.s et leurs proches » souligne Manon Molins, responsable de la plateforme MoiPatient.
La richesse des échanges et l’enthousiasme suscité par ce séminaire sont des signaux très favorables, qui lassent présager un franc succès pour la suite de nos projets communs !