Pourquoi est-il préférable de ne pas passer par la dialyse avant d’être greffé-e ?
Etre greffé-e directement sans passer par la dialyse, à partir d’un donneur vivant ou décédé, permet d’espérer les meilleures chances de succès de la greffe. Les explications du Pr Lionel Rostaing, du CHU de Grenoble.
Les greffes rénales réalisées sans dialyse préalable – comparativement à celles réalisées après une période de dialyse – sont celles qui permettent au patient d’avoir une espérance de vie plus longue et un greffon qui fonction plus longtemps. On parle alors de greffe préemptive.
En France, cela a été démontré dès 2005(1). Ces résultat ont été confirmés récemment(2). Une nouvelle étude s’est intéressée à 22 345 patients qui ont reçu une greffe rénale dans notre pays entre 2002 et 2012. 3112 de ces greffes (14%) étaient faites sans dialyse préalable. La survie des reins greffés préemptivement était significativement meilleure que celle des reins transplantés chez des patients ayant été dialysés, y compris lorsqu’ils avaient passé moins de six mois en dialyse.
Au Japon, où l’espérance de vie en dialyse est une des plus élevées au monde, il y a moins de décès parès la greffe chez les patients ayant reçu une greffe préemptive(3).
Enfin, aux USA, la survie des greffons rénaux 10 ans après la greffe est meilleure chez les patients qui n’ont pas été dialysés avant la greffe ; de plus chaque tranche de 6 mois passée en dialyse (jusqu’à 24 mois et plus) réduit un peu plus la survie des greffons(4).
En France, durant l’année 2018, 41% des patients inscrits sur la liste nationale d’attente de greffe rénale l’ont été alors qu’ils n’étaient pas encore dialysés, mais seulement 15% des greffes ont été préemptives avec de grandes variations selon les équipes de greffe.
Patients et soignants considèrent encore trop souvent que la dialyse est une étape incontournable avant la greffe, ce qui est faux et contre-productif comme le démontrent toutes ces études.
Compte tenu de ses avantages médicaux, humains, mais aussi économiques – le coût de la dialyse est sensiblement plus élevé que celui de la greffe – la greffe préemptive doit être développée et encouragée.
Les patients ont un rôle important à jouer pour demander à y accéder.
1) Chalem Y, Ryckelynck JP, Tuppin P, et al. Access to, and outcome of, renal transplantation according to treatment modality of end-stage renal disease in France. Kidney Int. 2005 Jun;67(6):2448-53.
2) Prezelin-Reydit M, Combe, Harambat J, et al. Prolonged dialysis duration is associated with graft failure and mortality after kidney transplantation: results from the French transplant database. Nephrol Dial Transplant. 2019 Mar 1;34(3):538-545. doi: 10.1093/ndt/gfy039.
3) Goto N, Okada M, Yamamoto T, et al. Association of Dialysis Duration with Outcomes after Transplantation in a Japanese Cohort. Clin J Am Soc Nephrol. 2016 Mar 7;11(3):497-504. doi: 10.2215/CJN.08670815.
4) Meier-Kriesche HU, Kaplan B. Waiting time on dialysis as the strongest modifiable risk factor for renal transplant outcomes: a paired donor kidney analysis. Transplantation. 2002 Nov 27;74(10):1377-81